…Priorité doit également être accordée à la réforme de l’appareil judiciaire et l’exécution effective des jugements en matière de violences sexuelles

5 Questions à Bukeni Marozi

[Le Potentiel]

1. Dans un futur proche, Witness et ses partenaires vont lancer un film sur les violences dont la femme congolaise est victime. Dans quel contexte ce film sera-t-il lancé ?

Le film est intitulé « Nos voix comptent : les femmes de la RDC demandent justice et responsabilité ». L’opinion retiendra qu’il y a plus de 10 ans que l’Est de la RDC est en     proie à des conflits armés. Les femmes en ont payé très cher. Des milliers de femmes et de jeunes filles ont été exposées à des actes de viol et  de violences sexuelles, commis par toutes les parties engagées dans ce conflit armé. La grande échelle sur laquelle les crimes sexuels ont été commis, l’impunité généralisée et la stigmatisation liées à ces crimes laissent des milliers de victimes isolées dans leurs propres communautés, avec un accès très limité à l’assistance dont elles ont urgemment besoin.

2. Pouvez-vous révéler en quelques mots ce que relate le film ?

Les images ont été filmées par cinq d’entre les 120 partenaires de Women’s initiatives dans l’Est de la RDC. Les femmes qui ont fait leurs témoignages expliquent entre autres le calvaire qu’elles ont vécu et le parcours de combattantes qu’elles ont pu emprunter pour atteindre le tribunal. L es experts en matière judiciaire et psychosociale interviewés dans le film, déplorent ce manque de proximité entre le justiciable  et le juge. Ils condamnent également l’inaction du gouvernement congolais. A travers de récentes statistiques et déclarations des experts, le film présente une vue d’ensemble en matière judiciaire, économique et sanitaire. Ces femmes courageuses demandent  une action ultime de justice pour stopper ces viols et les prévenir en arrêtant les criminels, ainsi qu’un soutien adéquat.

3. Une certaine opinion pense que la RDC a fourni des efforts dans le domaine judiciaire. Et qu’au regard de réaménagements envisagés, la question de l’impunité pourra être prioritaire. Etes-vous de cet avis ?

Bien que la RDC ait enregistré des progrès dans la criminalisation du viol et des autres formes de violences sexuelles en adoptant plusieurs lois en la matière, l’application de ces lois reste un grand défi. L’accès à la justice et l’exécution des décisions judiciaires  en matière de  violences sexuelles demeurent un obstacle majeur et découragent les victimes. Les rapports de viol ne sont pas pris en compte ou sont négligés.  Rares sont les cas considérés dont les suspects sont arrêtés, jugés et condamnés à des peines. Très souvent les suspects qui sont arrêtés sont relâchés par la suite, affaiblissant ainsi la lutte contre l’impunité. Le film dont il est question retrace  en 25 minutes le récit de six femmes du Nord-Kivu et du Sud-Kivu ainsi que de la Province Orientale. Elles sont victimes de violences sexuelles et dont les auteurs identifiés comme les militaires des Forces armées de la RDC (FARDC), les rebelles rwandais de FDLR, les milices Maï-Maï et les rebelles ougandais de la LRA.

4. En quoi ce film se veut-il un plaidoyer ?

Ce film fait appel au nouveau Gouvernement, particulièrement les  ministres ayant en charge la Justice et le Genre. Que la priorité soit accordée à la lutte contre les violences sexuelles. De manière spécifique, ce film souligne l’importance pour le gouvernement, d’accorder la priorité à l’éradication de l’impunité pour les auteurs de violences sexuelles, à la facilitation à l’accès en justice pour les femmes victimes…Priorité doit également être accordée à la réforme de l’appareil judiciaire et l’exécution effective des jugements en matière de violences sexuelles ; l’urgente mise à disposition d’une assistance psychosociale, économique et sanitaire aux femmes victimes de violences sexuelles.

5. Qu’en est-il du lancement de ce film ?

WITNESS, Women’s initiatives for gender justice et les autres partenaires de l’Est de la RDC vont lancer le film en début de semaine prochaine, avec des séances privées pour la ministre du Genre, de la famille et  de l’Enfant. Déjà mardi prochain, une réception sera organisée au Grand Hôtel de Kinshasa, pendant laquelle les ministres précités s’adresseront à l’auditoire. Celui-ci sera composé de représentants du corps diplomatique, de représentants des Nations Unies, ceux de la Société civile et autres. Deux d’entre les partenaires de Women’s initiatives for gender justice ayant participé à la réalisation du film seront à Kinshasa pour  participer à la cérémonie de lancement du court-métrage. A Kinshasa, le lancement sera suivi par des projections et activités  dans l’Est du pays. Notamment dans la province du Nord-Kivu et du Sud- Kivu et la Province Orientale.

Le Potentiel

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