(Le Phare)
Après avoir sérieusement secoué le microcosme politique congolais le week-end dernier, en portant des accusations graves contre le député national Clément Kanku, au motif qu’il serait l’un des commanditaires des violences que connaît le Grand Kasaï depuis neuf mois, le quotidien américain The New York Times est revenu à la charge dans son édition du mardi 23 mai 2017. Tout en réaffirmant l’implication de cet ex-ministre dans les massacres qui touchent sa province d’origine, ce journal vient de jeter un terrible pavé dans la mare en accusant la Monusco d’avoir fait montre d’une négligence avérée aussi bien en amont, dans la protection de deux fonctionnaires onusiens assassinés au Kasaï Central, qu’en aval, au chapitre des investigations ayant conduit à la découverte de leurs cadavres.
Selon The New York Times, la Monusco n’aurait pas pris les dispositions sécuritaires requises avant le déplacement de deux enquêteurs vers une partie de la République où l’insécurité était généralisée, suite non seulement aux attaques des miliciens Kamuina
Nsapu, mais aussi aux actions de représailles des forces armées et de sécurité congolaises, sur fond de violations massives des droits de l’homme et de bavures sans nombre. Le journal soutient que Zaïda Catalan et Michaël Sharp n’auraient pas reçu les informations utiles sur la situation sécuritaire réelle qui prévalait sur le terrain, la Monusco les ayant laissés s’aventurer dans une jungle sans nom avec comme moyen de transport une moto et comme accompagnateur un seul interprète.
The New York Times fustige aussi ce qu’il considère comme un laxisme de la part de la Monusco, qui a tardé à lancer ses limiers sur le terrain, en dépit de la diffusion d’informations concordantes confirmant la disparition et même leur élimination physique par des exécuteurs qui restent à identifier. La même publication estime que plusieurs autorités tant civiles que
militaires congolaises, en dehors de Clément Kanku, seraient impliquées dans les massacres qui endeuillent le Grand Kasaï. Le fait que cet acteur politique ait été mêlé à ce dossier ténébreux à l’époque où il faisait partie du gouvernement pousse The New York Times à croire que le brûlot kasaï en serait l’œuvre de plusieurs officiels. A propos de l’implication présumée des responsables politiques et militaires congolais, ce journal accuse la Monusco de silence complice, pour n’avoir rien dénoncé jusqu’à l’affaire de la vidéo faisant état d’exécution des villageois non armés par des éléments des FARDC ainsi que d’autres documents filmés révélant l’existence de plus d’une quarantaine de fosses communes.
S’agissant de la Monusco toujours, on rappelle qu’en marge du renouvellement de son mandat, l’ambassadrice des Etats-Unis aux Nations Unies l’avait accusée d’avoir lamentablement échoué dans sa mission, pour n’avoir contribué ni au retour d’une paix durable, ni à la protection des populations civiles. Au contraire, elle s’est contentée d’accompagner les différents gouvernements congolais dans le pourrissement du climat politique, l’entretien des foyers d’insécurité, le pillage des ressources naturelles, etc. La représentante des USA a indiqué qu’en 1960, avec peu de moyens
financiers, humains, logistiques et technologiques, l’ONUC avait réussi à ramener la paix et l’unité au Congo en quatre ans, au milieu des luttes d’hégémonie entre les blocs Ouest et Est. Il n’est pas exclu qu’en septembre, elle revienne à la charge avec un réquisitoire plus violent.
Le Conseil de Sécurité rejette les conclusions de la justice militaire
congolaise
Réuni le mardi 23 mai 2017 en urgence, pour examiner le dossier des
fonctionnaires onusiens assassinés en marge du phénomène Kamuina
Nsapu, le Conseil de Sécurité a rejeté, de manière catégorique, les
conclusions de la justice militaire congolaise et la liste des
suspects dressée par ses soins. Aux yeux des membres de cette
institution des Nations Unies, il faut une enquête internationale
indépendante pour faire éclater la vérité vraie sur la double
exécution de deux experts onusiens les massacres des civils,
militaires et policiers, les fosses communes, les violations massives
des droits de l’homme, depuis le mois d’août 2016. L’attitude du
Conseil de Sécurité apparaît, à plus d’un égard, comme un appel du
pied à la Procureure de la CPI (Cour Pénale Internationale) afin
qu’elle se saisisse rapidement du dossier des massacres du Kasai, que
l’intéressé a du reste déclaré suivre de fort près. Il n’est pas exclu
qu’en marge du procès en instance de s’ouvrir en RDC, la justice
internationale ne prenne tout le monde de vitesse.