(RRSSJ)
INTRODUCTION
L’implication des Organisations de la Société Civile dans le processus de désarmement et de la sécurité internationale remonte en 1998, au lendemain de l’avènement de l’Alliance des Forces Démocratiques pour la Libération du Congo [AFDL].
C’est à cette période que des Organisations de la Société Civile congolaises, après avoir applaudi la chute de la dictature, se sont vite ressaisies en dénonçant le « Phénomène Kadogo » et en déplorant la présence des milliers d’enfants soldats, parmi les « libérateurs ».
C’était à l’époque où les Principes de Cap n’étaient pas encore intégrés dans la nomenclature de la RDC, avec la notion beaucoup plus élargie de « Enfants associés aux forces et groupes armés ». En d’autres termes, les « Kadogo » répondaient parfaitement au profil d’enfants soldats, parce que portant armes et – dans une certaine mesure – l’uniforme.
1° Forces des Organisations de la Société Civile congolaises
La démarche de la Société Civile, appuyée par le Fonds des Nations unies pour l’Enfance [UNICEF], s’inscrivait dans l’urgence et visait des actions de lobbying et de plaidoyer en faveur de la démobilisation et de la réinsertion de ces « Kadogo ». Il va sans dire que l’’étape de désarmement est ici sous-entendue pour des personnes âgées de moins de dix-huit ans qui devaient simplement quitter [sans condition] une structure qui n’était pas favorable à leur développement et à leur survie. L’occasion faisant le larron, les Organisations de la Société Civile ont eu à accompagner le processus DDR [Désarmement, Démobilisation et Réinsertion] en République démocratique du Congo, à travers les trois phases ci-après :
- Le Bureau National de Désarmement et Réinsertion [BUNADER], une structure placée sous la double tutelle des Ministères de la Défense Nationale et des Droits Humains.
- La Commission Nationale de Désarmement, Démobilisation et
Réinsertion [CONADER], créée le 18 décembre 2003, par Ordonnance
présidentielle, pour assurer la coordination de la mise en œuvre du Programme National de Désarmement, Démobilisation et Réinsertion
[PNDDR].
- L’Unité d’Exécution du Programme National de Désarmement,
Démobilisation et Réinsertion [UE-PNDDR], en remplacement de la CONADER.
La principale force de la Société Civile, dans ce programme, étaient la sensibilisation et la mobilisation communautaire, autour du processus DDR.
C’est ainsi que :
- des milliers de familles – à travers le pays – ont été touchées et préparées à la réunification, à la relocalisation ou à la réinsertion des enfants sortis de forces et groupes armés ;
- des regroupements entiers ont été mobilisés en vue de l’appropriation du désarmement communautaire [cas de l’Ituri, en Province Orientale] ;
- la formation professionnelle/apprentissage des ex-combattants, éligibles au PNDDR, et leur accompagnement à la réinsertion socio-économique ont été assurés… Les mêmes forces [capacités de plaidoyer, de sensibilisation et de mobilisation communautaire] ont été aussi avérées quant à l’implication de la Société Civile dans lutte contre la circulation illicite des Armes Légères et Petit Calibre [ALPC] et autres opérations : Arme contre Vélo, Arme contre Tôles, etc.
Etant précisé que l’objectif général du PNDDR comportait, entre autres, les volets renforcement de la sécurité et stabilisation régionale, l’implication et la participation de la Société Civile ont également concerné la SECURITE
INTERNATIONALE.
Dans le même ordre d’idée, à l’heure actuelle, un réseau thématique d’Organisations de la Société Civile est suffisamment impliqué et accompagne le processus de la réforme du secteur de sécurité en RDC, depuis plusieurs années. Ses actions de plaidoyer, au niveau régional et international, visent plus la sécurité internationale, à commencer par la sous-région des Grands Lacs d’Afrique.
2° Faiblesses des Organisations de la Société Civile congolaises
Les atouts dont disposent les Organisations de la Société Civile congolaises, en matière de désarmement et de sécurité internationale se heurtent souvent à des obstacles que l’on peut qualifier de faiblesses. Celles-ci sont à la fois internes et externes et peuvent se résumer de la manière suivante :
- a) Faible coordination des interventions
La plupart d’interventions des Organisations de la Société Civile congolaises, dans le secteur de désarmement, sont effectuées individuellement, sans trop se référer à certaines dispositions. La faible coordination entre les ONG ne favorise pas le partage adéquat d’informations et laisse libre cour à des dédoublements sur terrain… Le DDR-Enfants qui semblait bien pensé, avec un Cadre Opérationnel édictant des normes, procédures et directives, n’a pas dérogé à la règle : des partenaires reprenaient les mêmes bénéficiaires, remettaient des kits d’accueil ou de réinsertion complètement différents des autres, donnaient du cash aux bénéficiaires, contrairement aux recommandations préétablies, etc.
- b) Accès limité aux ressources
Par ressources, nous faisons allusion à l’expertise locale et aux moyens financiers.
Le contraste sur terrain démontre que parfois des ONG ne bénéficiant pas d’une expertise requise accèdent au financement, dans le cadre du processus de désarmement et vice et versa. Comme on peut le constater, cette faiblesse est loin d’encourager des fructueux échanges, entre ONG, sur les bonnes pratiques et les leçons apprises, par exemple…
- c) Perception du désarmement par les acteurs étatiques
La perception de la plupart d’acteurs étatiques demeure exagérément « carrée » sur le secteur de désarmement. La raison souvent avancée par les uns et les autres porte sur le « domaine sensible », « question stratégique », « secret-défense » et autres.
Une attitude qui ne permet pas de considérer la Société Civile comme un véritable partenaire, avec lequel il y a lieu de collaborer/coopérer en vue de l’amélioration du travail de désarmement et de la situation sécuritaire.
En conclusion, les Organisations de la Société Civile de la RDC contribuent efficacement dans le processus de désarmement. Leur implication constitue un atout majeur quant à la sensibilisation et la mobilisation communautaire. Leurs actions de plaidoyer, notamment auprès du Parlement, ont abouti à quelques avancées concernant le cadre légal et réglementaire en la matière.
A l’opposé, des faiblesses allant du niveau quasi inexistant de coordination à la perception du désarmement par les acteurs du secteur public, semblent diminuer l’impact de l’apport de ces organisations dans le processus.
Clovis KADDA
Assistant chargé de Suivi et Evaluation
BCN-RRSSJ