[Le Phare] Depuis la tenue des élections présidentielles et législatives du 28 novembre 2011, la nation congolaise dans son ensemble et en particulier, des structures organisées de la société civile, appelle à l’observance des valeurs et principes universels notamment la vérité, la justice et le dialogue. De plus en plus, il se dégage une compréhension claire de ce que la société congolaise veut : le retour collectif aux valeurs morales et principes de justice. De la majorité des déclarations publiques, partant des observations des élections faites en novembre/décembre 2011 par des organisations nationales et internationales, au message du Cardinal Monsengwo aux jeunes le dimanche premier avril 2012,
il s’avère que le dialogue est la conclusion à laquelle tous sont arrivés, pour résoudre l’impasse politique dans laquelle la Commission Electorale Nationale Indépendante (CENI) a plongé la république en facilitant des fraudes et autres irrégularités électorales. Bien que dans la diaspora l’expression ait été plus virulente et violente dans certains pays, le sentiment de frustration est général et mérite une attention particulière des congolais ayant la gestion de l’Etat, ainsi que les partenaires bilatéraux et multilatéraux au développement.
Le dialogue tant souhaité par la société civile congolaise se veut être la communication entre les groupes de personnes constitués en partis politiques en compétition pour des mandats politiques, en vue de produire un accord sur la gestion de la chose publique. Outre la circonscription du concept, la société civile s’est défini le rôle moteur qu’elle entend jouer pour faire aboutir l’aspiration de la société. C’est dans ce cadre que la Nouvelle Société civile (NSCC) initie une pétition exigeant la démission de la CENI en recommandant d’ouvrir à la société civile le nouvel organe de gestion de prochaines élections. C’est aussi le sens de la recherche du dialogue qu’on peut donner à la démarche des évêques Congolais, membres de la Cenco (Conférence épiscopale nationale du Congo), conduits par leur président, Mgr Nicolas Djomo, évêque de Tshumbe, auprès du président Joseph Kabila à Kingakati, M. Etienne Tshisekedi à Limete et Vital Kamerhe aàla Gombe.
Le dialogue est une vertu qui ne peut se faire sans la vérité. Dans sa lettre au Secrétaire Général de l’ONU du 07 février 2012, la plate forme d’ONG appelée « Agir Ensemble pour des Elections Transparentes et Apaisées » (AETA) avait attiré l’attention de l’ONU sur ce qu’elle pensait être la vérité des élections de novembre 2011 en DRC : un pays à deux chefs d’Etat dont l’un légalement investi, mais sans légitimité, et l’autre légitime, mais sans assise légale. Depuis lors, cet état de choses est discuté à longueur de journée dans des quartiers généraux des partis politiques, sans trouver une solution définitive et durable. L’Eglise Catholique, se référant à sa mission pastorale, avait réclamé la vérité des urnes pour éclairer l’opinion. Jusqu’à ce jour, la discussion continue sans que la vérité ne soit dévoilée. Ainsi donc, il se fait constater que la société civile continue à demander la conformité de ce que la CENI dit sur les élections avec la réalité. Elle exige des références dont on peut rapporter la preuve.
La justice est comprise comme un principe juridique et moral à portée universelle, signifiant que les actions posées soient sanctionnées ou récompensées en fonction de leur mérite au regard du droit ou de la morale. C’est ainsi que le 14 mars, une grande partie de la nation congolaise avait accueilli avec satisfaction le verdict (sanction pénale) de la Cour pénale internationale (CPI) condamnant Thomas Lubanga, pour des faits qu’elle avait déjà moralement condamnés et décriés pendant des années. Des actes passibles de pénalités juridiques, constitutifs des abus des droits humains et autres brutalités policières avaient été décriés et condamnés par la société civile depuis décembre 2011. Le Parquet General de la République (PGR) et la Mission des Nations Unies pour la Stabilisation de la RDC (MONUSCO) promettent de s’en saisir et ouvrir des enquêtes aux fins des poursuites judiciaires et rendre justice à la nation. L’élan des demandes de justice a été renforcé le jeudi 29 mars par la mission d’observation électorale de l’Union européenne qui venait de rendre public son rapport final sur les élections présidentielle et législatives concluant au manque de crédibilité déjà décrié par la société civile congolaise, des partis politiques et le Centre Carter depuis janvier et février derniers.
Il se lit clairement que la société civile attend des solutions juridiques et politiques pour chaque situation de grande ampleur. Le PGR et la MONUSCO ont promis d’enquêter sur les violences massives des Droits humains en période électorale dénoncées par les ONG des droits humains et le Bureau Conjoint des Nations Unies aux Droits Humains (BCNUDH). Cependant, les ONG et la presse congolaises continuent à demander que le PGR se saisisse aussi des faits constitutifs d’actes criminels dénoncés publiquement dans leurs différents rapports et qui démontrent le lien direct avec les présumés auteurs des « irrégularités électorales », causes de ces abus de droits humains. Il y a des fortes raisons de croire que sans l’organisation intentionnelle de ces fraudes, les forces de sécurité ne poseraient des actes criminels d’une telle ampleur. Par conséquent, il y a lieu d’approfondir des enquêtes sur « les irrégularités et fraudes » reprochées aux dirigeants de la CENI qui ont concouru à priver des citoyens de leur droit de vote et que des accusations soient clairement portées contre des individus présumés auteurs de ces crimes contre la démocratie, afin d’ajouter à l’opprobre populaire des sanctions personnelles de la Justice.
L’attention des enquêteurs du PGR et de la MONUSCO devrait valablement être attirée par une lecture comparée de (i) la cartographie d’abus des droits humains en période électorale publiés par les ONG des droits humains et le BCNUDH, (ii) la cartographie des irrégularités décriées telles que la grande circulation des bulletins de vote avant les élections ou la disparition des procès-verbaux, (iii) la cartographie des recours en protestation devant la Cour Suprême de Justice (CSJ). En rapport avec ces trois éléments, on regardera (i) la liste des élus provisoirement proclamés par la CENI, mais contestés par leurs concurrents devant la CSJ, et (ii) leurs liens de subordination ou de parenté avérés avec des personnes qui avaient le pouvoir réel de manipuler le processus électoral.
Il y a des raisons de croire que la classe politique et l’Assemblée Nationale en particulier ont la propension à avoir un taux suffisamment élevé de relation de dépendance entre élus et personnalité ayant mandat public au moment du vote qui frise des conflits d’intérêts au détriment de la nation, de ses idéaux, valeurs et principes fondant la constitution et qui permettent de se mesurer aux standards d’évolution démocratique tels que la poursuite du dialogue en permanence, de la vérité et de la justice.
Si le dialogue devrait se tenir dans la vérité et la justice, un grand nombre de préalables doit être considéré, afin de faire entendre l’indignation du peuple et ses préoccupations pour l’avenir de la nation, le respect et la promotion des valeurs et principes qui fondent la constitution de l’Etat. La nécessité est absolue de faire avancer l’idéal commun de la nation congolaise qu’est la démocratie.
Tshiswaka Masoka Hubert/Le Phare