[AFP]
30/10/2013
Le major James Mwendangabo a eu la peur de sa vie. Quand les rebelles du M23 lui ont demandé de se déshabiller avant d’évacuer la base de Rumangabo, dans l’Est de la République démocratique du Congo, il a cru sa dernière heure arrivée. Capturé par le M23 en novembre 2012 à Goma, la capitale de la province du Nord-Kivu, cet officier des Forces armées de la RDC (FARDC) vient de passer près d’un an en captivité. Comme huit autres soldats, sales, en tenue civile, il est interrogé dans la base de Rumangabo, à une quarantaine de kilomètres au nord de Goma, par des militaires qui cherchent à vérifier la véracité de leur récit. Ce camp stratégique, centre de formation militaire, a été repris pratiquement sans combats lundi matin. A l’issue de l’examen, le colonel Olivier Hamuli, porte-parole de l’armée pour le Nord-Kivu, estime que la bonne foi des neuf hommes ne peut être mise en doute. Dimanche soir, « les rebelles nous ont fait sortir et on nous a dit d’ôter nos tenues militaires », raconte le major Mwendangabo, « ils voulaient que d’autres [rebelles] puissent les utiliser pour monter au front ». « J’ai vite compris qu’ils allaient me tuer », ajoute ce commandant, affirmant être parvenu à tromper la vigilance de ses geôliers et à s’échapper. « Nous étions maltraités », dit-il à un journaliste de l’AFP, « j’ai passé six mois dans la prison avec d’autres personnes. On était environ 200. Puis ils m’ont mis à l’isolement », ajoute-t-il. De temps à autre, « ils prenaient des gens parmi nous, certainement pour les tuer puisqu’on ne les a jamais revus à ce jour », raconte-t-il.
Des munitions laissées par les rebelles
Dans l’une des armureries de la base construite par les Belges avant l’indépendance, on peut voir des munitions laissées par les rebelles : deux cents obus de mortiers de différents calibres, environs 300 paquets de balles de la taille d’une cartouche de cigarettes et des milliers de balles éparpillées sur le sol.
Selon toute vraisemblance, les hommes du M23 sont parvenus à évacuer une bonne partie de leur armement. « Samedi et dimanche matin, nous avons vu les rebelles prendre leurs effets et partir en direction de Runyonyi », plus à l’est, indique Patient Nagarame, qui vit près de la base. Plusieurs témoignages confirment que les derniers combattants du M23 se regroupent depuis mardi dans ces collines verdoyantes à plus de 2.000 mètres d’altitude.
Les rebelles ont néanmoins laissé deux jeeps à Rumangabo, mais ils ont pris soin de brûler les deux canons de DCA de cette base de plusieurs hectares, où la vie de caserne commence à reprendre.
Arrivant par camions du sud, les militaires s’installent dans le camp. Alignées sur plusieurs rangées, les petites maisons aux murs jaunes délavés et aux toits de tôle rouge sont prises d’assaut par les soldats fraîchement débarqués, paquetage sur le dos et petit bidon d’eau à la main. Une nuit dans du dur, voilà qui change pour ceux qui se relayaient sous bâche sur le plateau aux alentours de Kibumba (25 km au nord de Goma) jusqu’à la reprise des combats, le 25 octobre, après presque deux mois de trêve.
En contrebas de la base, le marché est animé. Les militaires ont touché leur solde et achètent des chaussettes, des piles, des torches ou du petit équipement, quelques cigarettes aussi dans la fumée des brochettes qui grillent.
Jacques Kagura, 26 ans, est « content de voir les militaires ». « Voilà qui nous ramène l’ambiance dans laquelle on vivait il y a longtemps », dit-il.
« On a souffert avec le M23, ils nous taxaient », raconte le jeune homme, « certains habitants ont encore peur de revenir car nous savons que le M23 aime la guerre alors nous sommes un peu réservés ».