(Le Potentiel)
En attendant le renouvèlement de son mandat qui prend fin le 30 juin 2014, la Mission des Nations unies pour la stabilisation du Congo (Monusco) fait déjà ses valises pour installer son quartier général (QG) dans la partie Est de la RDC. Au sein de la mission onusienne, le mouvement du personnel se fait déjà sentir. Tout est mis en place pour qu’à partir du 1er juillet 2014, l’essentiel de ses activités se concentre dans l’Est du pays. Une délocalisation qui sent l’odeur de la balkanisation – l’avènement de la République du Soudan du Sud ayant été précédé d’un tel mouvement du personnel onusien vers Juba.
Même si, à l’officiel, aucune résolution n’a encore confirmé la délocalisation du quartier général de la Monusco pour l’Est de la République démocratique du Congo, dans les rangs du personnel onusien, l’on se prépare déjà à ce qui paraît plus que jamais comme une évidence.
Le QG de la Monusco à l’Est ne relève donc plus de l’utopie. Le lit est déjà dressé. Car depuis un temps, la Monusco délocalise pour l’Est une bonne partie de ses activités, longtemps concentrées à Kinshasa. Tout est mis, renseignent des sources généralement bien informées, pour une installation définitive dès le 1er juillet 2014 du QG de la Monusco dans la partie Est de la RDC.
Des villes telles que Goma ou Bukavu sont ciblées pour abriter l’essentiel de la présence des soldats de la paix de l’ONU en RDC. La situation fragile de l’Est étant au centre des préoccupations, dans les couloirs des Nations unies, l’on trouve que la Monusco ferait mieux d’établir ses bureaux dans une ville de l’Est au lieu de les maintenir à Kinshasa, à environ 2 000 km de ses zones d’opérations.
COMME AU SOUDAN
Si à l’ONU, commentent les mêmes sources, l’option de la délocalisation du QG ne fait l’ombre d’aucun doute, dans certains milieux spécialisés à Kinshasa, la décision est interprétée de diverses manières.
Dans ces milieux donc, on tente de faire un lien avec les déclarations faites il y a quelques mois par Johnnie Carson, alors sous-secrétaire d’Etat américain aux affaires africaines, devant The Brookings Institution, un think tank américain.
L’on se rappelle qu’à cette époque, l’ex-secrétaire d’Etat américain aux affaires africaines avait relevé qu’il était important pour tous les partenaires extérieurs impliqués dans la résolution de la crise congolaise d’expérimenter la thérapie mise en œuvre au Soudan et en ex-Yougoslavie pour faire venir à bout la pieuvre qui mine la partie Est de la RDC.
Dans une intervention le 11 février 2013 devant le think tank américain, The Brookings Institution, Johnnie Carson avait, tout en réitérant l’appui des États-Unis à un processus de paix sous l’égide de l’ONU pour la RDC, indiqué que « pour la communauté internationale, estimé que trouver une solution durable à l’instabilité prolongée en RDC demeurera un défi redoutable ».
Quant à cet accompagnement, les exemples de l’ex-Yougoslavie et du Soudan étaient éloquents, pensait-il. « Nous sommes parvenus à une telle solution pour mettre un terme au conflit dans l’ex-Yougoslavie par le biais des Accords de Dayton. Nous avons réussi à mettre un terme à la plus longue guerre civile qu’ait connue l’Afrique, le conflit au Soudan, grâce à l’Accord de paix global négocié par les États membres de l’EGAD et appuyé par les États-Unis, la Norvège et la Grande-Bretagne. Il faut maintenant un nouvel effort international dynamique au service de la RDC », avait-il déclaré, comme indiquant la voie à suivre pour venir à bout de la crise permanente de la partie Est de la RDC.
Aussi, pour avoir réussi dans l’ex-Yougoslavie et au Soudan, la recette onusienne est-elle sur le point d’être appliquée à la RDC. Déjà, à la Monusco, le décor est en train de se mettre en place. Sinon, rien ne saurait justifier l’accélération des préparatifs pour l’installation définitive de son QG dans l’Est du pays. Il y a certainement un fil conducteur qui guide toutes ces actions. C’est la balkanisation de la RDC – l’Est ayant été déjà ciblée comme zone à risques.
LE DECOR SE MET EN PLACE
Par déduction, des analystes ont vu dans ces déclarations du diplomate un penchant vers la balkanisation de la RDC, dans la mesure où la paix en ex-Yougoslavie tout comme au Soudan s’est négociée en échange de la balkanisation. Ainsi, l’ex-Yougoslavie s’est disloquée en différents Etats, alors que le Soudan a recouvré la paix moyennant la reconnaissance, en 2011, de la République du Soudan du Sud. Or, rappellent les mêmes analystes, peu avant la création du Soudan du Sud, les troupes de l’ONU qui se trouvaient alors concentrées à Khartoum, capitale du Soudan, s’étaient délocalisées au Sud, en installant leur quartier général à Juba, qui deviendra plus tard la capitale du Soudan du Sud.
L’exemple du Soudan servant désormais de cas d’école, est-ce la même expérience que l’Onu voudrait tenter en RDC ?
Ceci expliquant cela, la question vaut évidemment son pesant d’or. Car malgré une accalmie relative dans l’Est de la RDC, à la suite de la déroute des ex-rebelles du M23, les tenants de la thèse de la balkanisation du Congo n’ont jamais désarmé – le schéma étant toujours à l’ordre du jour dans divers milieux occidentaux.
Que dans cet environnement incertain, la Monusco décide de déplacer ses bureaux de Kinshasa pour l’Est de la RDC, il y a bien des raisons de s’inquiéter. Il ne faut pas oublier, comme l’a rappelé Johnnie Carson, que l’Onu reste toujours attachée au cas RDC, au schéma qu’elle a appliqué en Yougoslavie et au Soudan. La RDC n’est donc pas encore sortie de l’ornière. Elle est toujours dans le viseur des décideurs internationaux qui agissent maintenant via les Nations unies.
La délocalisation du quartier général de la Monusco tient donc à un schéma bien précis, dont le fil conducteur reste et demeure encore et toujours la balkanisation de la RDC. Sinon, rien ne saurait justifier que les Nations unies concentrent toutes leurs forces et tout leur personnel à la seule partie Est de ce pays sous-continent si ce n’est pour baliser la voie au détachement de cette partie du reste de la RDC. Le Soudan est passé par là. Il faut craindre que la RDC n’emprunte le même chemin.