Commune de Kinshasa : une étude épingle la collusion entre policiers et «kuluna»

(Le Phare)

Les opérations Likofi 1 et 2 initiées par la Police nationale congolaise, pour lutter contre un type particulier de banditisme urbain, relèvent désormais du passé. Le bilan donné par le ministre de l’Intérieur, Sécurité, Décentralisation et Affaires coutumières, lors du point de presse qu’il a animé dernièrement, est largement positif. Sur 925 marginaux interpellés par la police, dont certains étaient arrêtés à la suite des plaintes de leurs victimes, de la clameur publique, ou en flagrant délit avec des armes blanches, 593 ont été déférés devant les quatre parquets de grande instance de Kinshasa.

Et le fait que quelques bandes ont pu échapper à la traque des éléments des opérations Likofi, et que la menace d’agression de ces délinquants persistait encore dans de nombreux coins de la ville de Kinshasa, Richard Muyej a annoncé le lancement dans les tout prochains jours, de l’opération Likofi 3.

Mais pour permettre une meilleure compréhension de ce phénomène de banditisme urbain qui a semé la mort et la désolation dans la capitale Kinshasa, une étude financée par le Programme SSAPR dans son volet Recherche-Action et publiée grâce aux soins de la Mission Eupol RD Congo, vient apporter des réponses claires aux questions embarrassantes que l’on se pose sur les Kuluna, dont la plupart sont des adolescents.

La localisation géographique de cette étude a couvert toute la commune de Kinshasa et a requis la collaboration de nombreux habitants à qui des interrogations précises ont été soumises sous forme de questionnaire. Les personnes abordées devaient donner leur perception du phénomène tel qu’elles le vivent au quotidien dans cette municipalité, et dans le cadre du diagnostic de sécurité réalisé avec la participation de la société civile représentée par le Réseau pour la réforme du secteur de sécurité et justice ( RRSSJ).

Dans cette étude préfacée par le chef de mission Eupol RD Congo, le commissaire divisionnaire Jean-Paul Rikir, les chercheurs abordent en premier lieu, la situation générale du gangstérisme urbain en RD Congo, avant de dévoiler la carte signalétique de la commune de Kinshasa, pour aboutir aux résultats de l’atelier des focus-groups, de l’enquête par questionnaire et des entretiens avec les habitants de cette commune.

Sur base des réponses recueillies, l’étude a tenté de définir les kuluna, en dressant leur portrait-robot, le mode d’ancrage territorial et géographique à partir de la localisation des écuries dans les quartiers, leur organisation, les habitudes de consommation des drogues et autres alcools frelatés.

L’étude a également révélé le recours aux fétiches qui donnent à ces marginaux, le sentiment d’invulnérabilité.

Quant aux mesures préventives prises par la police, les auteurs citent le rapport circonstancié établi par chaque poste de police, sous-commissariat et commissariat, la multiplication de ces postes de police, les patrouilles de la police dans les quartiers, et enfin, les invitations des parents des «kuluna» à les sensibiliser sur les crimes et  autres méfaits commis par leurs enfants.

Dans le paquet des mesures répressives, les bouclages ciblés viennent en premier lieu. Et puis, ce sont les interventions sur le terrain qui permettent l’arrestation de ces marginaux pendant leurs sinistres activités. Après avoir mis un accent sur les efforts déployés par la police, l’étude embraye  alors sur des critiques, relevant que beaucoup reste à faire. Si Brazzaville et la province du Bas-Congo sont devenues des points de refuge des «Kuluna» qui fuyent la traque à Kinshasa, la police ne peut étendre ses actions au-delà de son ressort territorial. C’est ce qui fait qu’après une période, ces marginaux reviennent à Kinshasa pour rééditer leurs sinistres exploits.

Autres griefs sérieux faits à la police, est la complicité mise en exergue dans certains cas où l’on a vu des policiers partager le butin amassé par les malfaiteurs, consommer ensemble des drogues et dresser des P-V complaisants sur des crimes innocentant les malfaiteurs.

C’est dans ce secteur qùe les responsables de la police doivent creuser davantage pour écumer tous les méfaits commis par les hommes sous leurs ordres et qui méritent d’être renvoyés des rangs de la Police nationale congolaise.

Cette étude, comme il faudrait le signaler, a été menée par Crossy Mavakala Kalunseviko, chef de travaux à l’UPN, Germain Kuna, chef de travaux à l’Unikin, Patrick Mwamba, point focal de la coordination provinciale du RRSSJ, avec la collaboration de Nicolas  Berembaum, expert société civile de la Mission Eupol RD Congo, Clovis Kadda, Marie-Louise Phoba et Lena Mukendi du Bureau de la coordination nationale du RRSSJ, et de Guelord  Mayunga, cartographe système d’information géographique.

 

Recommandé pour vous

A propos de l'auteur : Adeline Marthe

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

*