(Groupe l’Avenir)
Poursuivant dans la même lancée avec les enquêteurs du bureau du mécanisme conjoint élargi, le maire de la ville de Goma au Nord-Kivu, Naason Kubuya Ndoole vient de tirer une sonnette d’alarme en faveur de la délimitation des territoires de ces deux Etats voisins.
Il a invité les gouvernements de la RDC et du Rwanda « à fixer officiellement les frontières » entre ces deux pays. C’était hier mercredi 25 juin que cette déclaration a été faite.
En effet, dit-il, cette clarification des frontières permettra de mettre fin aux incidents sécuritaires récurrents dont les populations congolaises sont victimes. Des enquêteurs des pays des Grands Lacs ont recommandé une autopsie pour déterminer les circonstances et les causes de la mort des cinq soldats congolais tués à la frontière avec le Rwanda le 11 juin.
Cette position du maire ne suscite aucun doute quant à l’intangibilité des frontières héritées de la colonisation. La Belgique devra être mise à contribution dans cette affaire afin qu’aucune borne ne soit déplacée.
Un rapport qui fait frémir le Rwanda
Dans leur rapport daté du 17 juin, les enquêteurs du bureau de mécanisme conjoint élargi n’ont pas pu vérifier les interprétations données par la partie rwandaise. Ils en appellent à la tenue d’un sommet.
Jusqu’ici, Kigali soutient que les soldats congolais avaient péri lors de combats alors que Kinshasa assure qu’ils ont été capturés et exécutés. Et même l’une des deux collines appartenant à la Rdc est revendiquée par le Rwanda, qui n’a pas souhaité signer ce rapport paraphé par huit autres pays de la Conférence internationale sur la région des Grands Lacs (CIRGL) et par des représentants de la Monusco.
Les enquêteurs n’ont trouvé aucune douille sur les deux sites décrits comme des sites d’affrontements par la partie rwandaise. L’officier rwandais leur a assuré que les cinq soldats congolais avaient péri lors de combats sur ces mêmes sites. Il a fait état de deux affrontements : l’un le matin, l’autre l’après-midi, à chaque fois pour repousser des militaires congolais qui avaient violé l’intégrité territoriale du Rwanda.
L’enquête n’a pas permis de corroborer cette version des faits. Cela apparaît clairement dans ce rapport riche d’une dizaine de pages. Le Colonel Emmanuel Kaputa, qui a co-paraphé le rapport pour la partie congolaise, a néanmoins tenu à l’indiquer une deuxième fois, au stylo, à côté de sa signature, et il a ajouté : « cela indique que ces soldats ont été capturés vivants en RDC pour être ensuite exécutés sur le territoire rwandais ».
Sur les photos versées en annexe, deux des cinq soldats tués ont le crâne ouvert, mais les clichés ne permettent pas de tirer des conclusions définitives. Les enquêteurs ont réclamé une autopsie. Une photo Google Earth leur permet de situer les collines Kanyesheza un et deux sur le territoire congolais. Ils reconnaissent néanmoins qu’elles sont disputées, et encouragent les forces armées des deux pays à se tenir à une distance raisonnable l’une de l’autre autour de cette zone.
Les enquêteurs recommandent aux pays des Grands Lacs d’organiser sans attendre un sommet consacré à la question des frontières entre ses Etats membres et en particulier celles qui séparent la RDC et le Rwanda.
Dossier complexe, réalité têtue
Quoi qu’il en soit, « la question [doit être traitée] au niveau gouvernemental. Nous, les autorités locales, notre rôle est d’interpeller, d’appeler et de solliciter que les gouvernements rwandais et congolais harmonisent les points de vue et venir fixer les frontières officiellement », a affirmé Naason Kubuya Ndoole sur les ondes de la radio onusienne.
Il a estimé qu’il s’agit d’un problème complexe auquel on doit vite trouver des solutions « pour finalement savoir comment gérer les relations transfrontalières entre les populations et les forces armées de ces deux pays ».
Le maire Naason Kubuya sollicite en urgence l’aide de la Communauté des pays des grands lacs (CPGL) et de la Conférence internationale pour la Région des Grands lacs (CIRGL) pour tracer des limites entre les deux pays.
« La CIRGL accompagnerait cette démarche pour planter les bornes ou alors fixer des limites physiques naturelles qui pourraient épargner et nos militaires et nos populations du danger », a suggéré le maire.
A ce jour, il est difficile de distinguer la frontalière entre le Rwanda et la RDC. Aucune borne officielle ne délimite les deux pays. Même les limites de la colline prêtent à confusion. Dans la zone neutre ou tampon, des champs sont plantés des deux côtés et des maisons ont été construites. L’on devra alors mettre fin à cette confusion, tenant compte aussi bien de la cartographie initiale que des photographies modernes.