(RRSSJ)
Les continuelles tueries cruelles de Beni trahissent les limites de l’approche militariste pour la neutralisation des groupes armés à l’Est de la RDC :
« Ce n’est pas en cassant le thermomètre que l’on peut mettre fin à la montée de la température. »
Kinshasa, le 27 novembre 2014 , L’insécurité persistante dans le territoire et la ville de Beni appelle la mise en place d’une stratégie plus globale et efficace couplant les solutions militaires et non militaires pour la neutralisation des groupes armés et la restauration de la paix dans la partie orientale de la République Démocratique du Congo, a déclaré aujourd’hui le Centre pour la Gouvernance, « CEGO », en sigle .
« Les tueries de Beni révèlent l’incapacité des autorités à mettre en œuvre les mesures de réorganisation des forces combattantes sur le terrain des opérations, mesures que ces autorités elles- mêmes ont récemment annoncées avec pompe et avec une forte campagne médiatique systématique », a déclaré ce matin, le Directeur du Centre pour la Gouvernance.
Le CEGO note avec préoccupation que la détérioration continuelle de la situation sécuritaire est la preuve de l’absence de coordination et de l’unité de commandement qui mine les unités des forces de sécurité engagées dans les opérations militaires. En particulier, le CEGO constate que les officiers déployés dans la conduite des opérations à Beni sont majoritairement issus d’un même groupe ethnique et se livrent régulièrement à des querelles intestines liées aux activités de fraude douanière, à l’exploitation illégale des ressources naturelles de la région et au détournement de la solde des troupes sous leur commandement. La lutte contre les groupes armés et la sécurisation des populations civiles sont ainsi reléguées au plus bas de l’échelle des priorités des forces de sécurité déployées dans la région.
La dégradation du climat de confiance au sein des troupes engagées sur le terrain des opérations est le résultat direct de l’impasse du processus de réforme du secteur de sécurité. Faute de réformes profondes en son sein, l’armée demeure marquée par le dédoublement des chaines de commandement ; les affectations et promotions au sein des forces de sécurité sont gangrenées par le clientélisme et la corruption.
Le CEGO dénonce aussi l’appel du gouvernement obligeant les populations civiles à fuir leur contrée pour s’installer le long de la nationale n°4 sous prétexte de se mettre à l’abri des attaques de l’ennemi sans qu’il ne soit préalablement préparer les conditions d’accueil et de survie dans les zones de refuge ; surtout qu’à ce jour le gouvernement n’a réussi à apporter aucune aide pour les milliers de déplacés de Beni-Oïcha installés en territoire d’Irumu, district de l’Ituri dans la province orientale.
CEGO note qu’en général la tendance quasi continuelle de recourir à la force pour la neutralisation des groupes armés aboutit invariablement à un cercle vicieux : la stratégie consiste essentiellement en des attaques contre les populations civiles prises pour cible par les parties au conflit et accusées de pactiser avec l’adversaire ou de refuser de dénoncer la présence de collaborateurs parmi elle. A ces attaques, les communautés ciblées répondent par la mobilisation des jeunes pour se protéger contre la répression des forces de sécurité nationales ou les représailles de la part des groupes armés étrangers actifs dans la partie orientale du pays.
Centre pour la Gouvernance
N°JUST/SG/20/1533/2012 F.92/19.159 du 23 octobre 2012 Adresse, téléphone et email : Nº11675, Avenue Mobutu Quartier Petro-Congo Kinshasa Masina Courriel : cgouverna@gmail.com , www.cegonetwork.org
Le Centre pour la Gouvernance réitère l’appel à la Mission de l’Onu pour la Stabilisation du Congo (MONUSCO) de s’acquitter efficacement de son mandat relatif à la protection des civils et à la neutralisation des groupes armées. Les Envoyés Spéciaux, en particulier ceux de l’Union Africaine et des Nations Unies, devraient tout faire pour obtenir du Gouvernement Congolais le respect de ses obligations à engager des réformes nécessaires pour doter le pays des forces armées, de police et de sécurité véritablement républicaines, au service de la Nation et exemptes de tous soupçons, notamment en matière de la criminalité transnationale organisée et des violations massives des droits de l’homme.
Recommandations :
Au Gouvernement Congolais
Ordonner une enquête indépendante sur les massacres de Beni et engager les poursuites contre les auteurs, co-auteurs et complices de l’intérieur comme et de l’extérieur du pays ;
Explorer le couplage des stratégies non militaires avec l’approche militaire dans la neutralisation des groupes armés ;
Mettre en place une enquête indépendante pour établir les responsabilités sur l’origine du trafic des uniformes militaires de l’armée congolaise et leur utilisation par les groupes armés, ainsi que sur l’enrichissement des officiers militaires déployés à Beni et les présumés détournements de la solde de militaires ainsi que sur la pratique du commerce illégal et de la fraude douanière auquel les officiers militaires se livrent ;
Remplacer tout le commandement du secteur opérationnel de Beni et repenser la chaîne de commandement du secteur opérationnel de Beni aux fins de reconstituer la confiance entre les unités combattantes et leur commandement, et de mettre fin dédoublement de commandement au sein des unités déployées sur le terrain des opérations ;
Engager des poursuites contre les officiers de l’armée, de la police et les responsables de services de renseignements sur qui pèsent des indices sérieux de complicité et/ou de culpabilité dans la collaboration avec l’ennemi ;
A la Commission Electorale Nationale Indépendante
S’abstenir d’engager précipitamment le peuple congolais dans un processus électoral local en l’absence de tout consensus entre les parties prenantes de peur d’entrainer le pays dans un nouveau cycle des violences ;
Aux partenaires financiers et techniques de la RDC
Réévaluer leur politique et leur appui à la formation et équipement d’un secteur de sécurité incapable de se reformer et de sécuriser la population ;
A la Mission de l’Onu pour la Stabilisation du Congo, particulièrement la Brigade d’Intervention
S’acquitter de son mandat et se déployer toute affaire cessante dans les zones en proie à l’activisme des groupes armés, particulièrement en Territoire de Beni ;
N°JUST/SG/20/1533/2012 F.92/19.159 du 23 octobre 2012 Adresse, téléphone et email : Nº11675, Avenue Mobutu Quartier Petro-Congo Kinshasa Masina Courriel : cgouverna@gmail.com , www.cegonetwork.org
Ouvrir une enquête sur les accusations de participation des éléments de la MONUSCO dans des trafics et de collaboration avec les groupes armés.
Aux Envoyés Spéciaux
Faire pression sur le gouvernement congolais à enquêter sur les soupçons faisant état de la collaboration de certains officiers et militaires avec les groupes armés, de l’implication dans le trafic des armes, munitions ainsi que le commerce illégal et la fraude douanière ;
Exercer une forte pression sur les leaderships politiques à Kinshasa, Kigali, Burundi et Kampala pour les amener à s’acquitter de leurs engagements pris au terme de l’accord cadre et autres instruments régionaux en vue du rétablissement de la paix, de la sécurité et la promotion de la démocratie dans l’ensemble de la région des grands lacs ; leur crédibilité et prestige auprès des populations congolaises en dépendent.