(Groupe l’Avenir)
A quelques jours de son départ vers son Niger natal avant de le représenter aux Nations Unies, M. Abdallah Wafy, Représentant spécial adjoint du Secrétaire général des Nations Unies chargé des opérations à l’Est a échangé hier avec quelques patrons de presse au quartier général de la MONUSCO. C’était une occasion indiquée pour encourager le travail qu’abat la presse congolaise. Avec l’expérience de ses six ans de présence permanente au sein de la MONUSCO où il a pratiquement gravi tous les échelons, il est d’avis que quelque soit la situation qui prévaut, s’il n’y a pas de dialogue sincère avec le Gouvernement congolais, il est difficile d’atteindre les objectifs que les deux parties se sont fixés. Ceci pour dire que la démocratisation, les bons offices, l’appui électoral, le renforcement des capacités, etc. ne peuvent se faire que s’il y a collaboration entre le Gouvernement et la MONUSCO.
Avec les patrons de presse, Abdallah Wafy s’est insurgé contre une disposition de la résolution du Conseil de sécurité selon laquelle, la MONUSCO peut ou avec les FARDC traquer les forces négatives. Il affirme ici qu’on ne peut pas d’un côté affirmer l’attachement à la souveraineté de la Rd Congo et de l’autre côté, lancer une opération unilatéralement sans le consentent de cet Etat. Comment peut-on lancer l’opération militaire en dehors des FARDC ? Quelle est alors la tâche des FARDC, si pas de protéger la population et ses biens, de sécuriser le pays, etc. ? Il ajoute que la MONUSCO peut mobiliser les ressources, mais si le Gouvernement n’est pas impliqué, elles ne serviront à rien.
Parlant par exemple des bons offices, il dit qu’on ne peut le faire que lorsque vous avez la confiance des différentes parties. Et de se demander encore, comment 20.000 hommes de la MONUSCO peuvent-ils opérer en ignorant 200.000 hommes des FARDC ? Pour lui, le meilleur outil pour défaire les forces négatives, ce sont les FARDC et la MONUSCO n’apporte que son expertise. Car selon lui, toutes les fois que les FARDC et la MONUSCO ont travaillé ensemble, il y a toujours de bons résultats. Et l’exemple le plus patent n’est autre que l’attaque contre le M23 qui a permis de les chasser du Nord-Kivu et de les obliger à faire une déclaration de cessation des hostilités à Nairobi au Kenya.
Au sujet de deux officiers des FARDC nommés dans l’opération contre les FDLR, Abdallah Wafy est de ceux qui pensent que le fait que Joseph Kabila ait nommé des généraux, c’est dans son droit. Mais la publicité qui a été faite autour de ces deux officiers est malsaine. Car rétorque-t-il, qui les a jugés ? Les Nations Unies n’ont manifesté que la réserve, parce que c’est une organisation conservatrice. Il ne s’agit donc pas d’une invention de la MONUSCO, mais de la simple application des règles.
La lutte contre les FDLR restera longue …
Il s’est réservé le droit de donner son évaluation de l’opération « Sukola 2 » contre les FDLR, d’autant que son institution n’est pas impliquée. Mais il a quand même reconnu que la lutte contre les FDLR restera longue, complexe et difficile. Car, contrairement aux M23, les FDLR vivent en familles. Dans vingt ans de cohabitation avec les populations congolaises, il s’est tissé des relations. Pour lui, il faut connaître le Kivu, les hauts plateaux pour connaître la réalité. Il faut veiller pour que l’opération n’entraine pas des conséquences humanitaires. Il a expliqué que les Nations Unies n’avaient pas pour vocation de faire la guerre.
Il a terminé par conseiller aux autorités congolaises de faire le lobbying au Conseil de sécurité. Parce que dit-il, de plus en plus, le problème de la Rd Congo est connu. Mais il a l’impression qu’il n’ y a pas une prise en compte que les guerres ne se gagnent pas seulement sur le champ de bataille, mais ailleurs. « Donnez-vous aussi les moyens de vous faire entendre », conseille-t-il, avant de donner un exemple d’Israël, un petit pays mais qui tient tête à tous les pays arabes. Au sujet du retrait de la MONUSCO, il dit que s’il y a une certitude qu’en retirant les casques bleus, il n’y aurait plus de guerre, le Conseil de sécurité le ferait. Et si on ne veut pas la présence de la MONUSCO, il faut une évaluation commune, c’est-à-dire, les deux parties, Gouvernement-MONUSCO doivent élaborer ensemble des objectifs qui seront évalués devant le Conseil de sécurité.
Au sujet des élections prochaines en Rd Congo, Abdallah Wafy souligne que dans l’histoire récente de ce pays, il a toujours résolu ses problèmes non seulement avec les élections, mais avec des concertations politiques. Est-ce que les élections sont de nature à régler la question de la gouvernance, s’est-il demandé, avant de dire qu’il est temps de jeter un regard sur l’histoire politique du pays et de tirer des enseignements. Car pour lui, il y a de choses qui marchent ailleurs, mais qui ne peuvent pas marcher en Rd Congo. Comment gérer un processus électoral avec 1.000 partis politiques, pendant que les Etats-Unis d’Amérique et la Grande Bretagne n’en ont que deux ?