Kinshasa poussé à négocier avec Kigali

[ Le Potentiel] La situation humanitaire créée par l’insécurité instaurée par le M23 dans l’Est n’a pas laisséindifférent le secrétariat exécutif de la Conférence internationale surla Région des Grands Lacs (CIRGL) qui annonce la tenue mercredi prochainà Addis-Abeba d’une session extraordinaire du comité interministérielrégional. Une seule interprétation se dégage : Kinshasa est poussé à négocieravec Kigali.

La coalition Kigali-Maffiainternationale met les bouchées doubles pour faire du M23 un groupe invulnérable,à l’instar du RCD et du CNDP à l’époque. Elle fournit hommes de troupes,armes, munitions et appuis multiples au nouveau groupe rebelle afin del’aider à résister à l’offensive lancée depuis plusieurs mois déjà parles Forces loyalistes.

Dans le même temps,la situation humanitaire créée par ces affrontements armés devient de plusen plus désastreuse : mort des populations civiles et déplacements massifsdes survivants qui, dans leur errance, sont exposés aux exactions et toutessortes d’intempéries.

Les Nations unies,l’Union européenne et, à leur suite, l’Union africaine ont dénoncé cettenouvelle vague d’insécurité dans l’Est créée par le M23 à la solde deKigali.

Toutefois, aucunemesure ni sanction n’a accompagné cette condamnation verbale. L’attitudedes uns et des autres laissait deviner l’ouverture des négociations commevoie de sortie de crise. L’Union européenne, la première, avait encouragéKigali et Kinshasa à poursuivre le dialogue, malgré les révélations durapport des Nations unies.

Cette fois, c’estla Conférence internationale sur la région des Grands Lacs (CIRGL) quifait le relais. Depuis Bujumbura, le secrétariat exécutif de la CIRGL annoncela tenue, le mercredi 11 juillet 2012 à Addis-Abeba en Ethiopie, d’unesession extraordinaire du Comité interministériel régional de la CIRGL.Cela en marge des sessions ordinaires de l’Union africaine (UA).

Selon le communiquéde presse rendu public le 6 juillet dernier, le secrétariat exécutif dela CIRGL précise que la réunion de la capitale éthiopienne aura pour préoccupation«d’évaluer la situation sécuritaire qui prévaut à l’Est de la RDC etd’arrêter des propositions et modalités concrètes de sécurisation et depréservation de bonnes relations entre les Etats de la région». Le documentindique que la démarche s’inscrit dans l’esprit du pacte sur la sécurité,la stabilité et le développement dans la région des Grands Lacs.

Pour justifier sadémarche, le secrétariat exécutif de la CIRGL rappelle deux engagementspris par les pays membres.

D’abord, celui contenudans la Déclaration de Dar es-Salaam relative à «leur détermination collectiveà faire de la région des Grands Lacs un espace de paix et de sécurité durable,de stabilité politique et sociale, de croissance et de développement partagés».

Ensuite, celui prisles 5 et 16 décembre 2011 à Kampala par les chefs d’Etat et de gouvernement(Ouganda) dans leur déclaration lors du 4ème sommet ordinaire et de lasession spéciale sur les violences sexuelles et basées sur le Genre (VSBG).Ils s’étaient engagés à, «dans un délai convenu, éradiquer les groupesarmés existants actuellement dans la région, conformément au protocolede la CIRGL sur la Non agression et la défense mutuelle».

Cela dit, Kinshasa est mis devant un fait accompli, à savoir négocier avec Kigali. Mais derrièrecelui-ci, son pantin de M23. Or, qui dit négocier suppose faire des concessions.Qu’est-ce que les deux parties vont se concéder dans la capitale éthiopienne? C’est là que le bat blesse. Le Rwanda a beau nié, démenti qu’il ne soutientpas le M23 mais les faits sont là, éloquents.

Les informations quiviennent du terrain ne sont guère reluisantes. Des défections se succèdentau sein des FARDC et les rebelles du M23 font tomber des localités lesunes après les autres dans la province du Nord-Kivu. Bien plus, nos fameuxmutins grossissent leurs rangs de manière exponentielle de même que leurpuissance de feu. Peut-on mettre cet exploit dans le compte de la providence? L’opinion nationale n’est plus aveugle du tout.

On voudrait bien prendreau mot la démarche du secrétariat exécutif de la CIRGL qui déplore la catastrophehumanitaire dans le Nord-Kivu, d’une part et, met en garde les auteursd’éventuelles violations graves des droits humains, crimes de guerreset crimes contre l’humanité, d’autre part.

Si les négociationsd’Addis-Abeba vont servir à renforcer la coopération bilatérale menacéede rupture, passe encore. Mais si elles sont destinées à faire acter lesrevendications exprimées par le M23 mais qui, en réalité, datent de l’époquedu CNDP et du RCD, la délégation de Kinshasa à Addis-Abeba est avisée :l’intégrité territoriale et la souveraineté de la RDC ne sont pas négociables.Autrement dit, aucune concession ne sera faite sur ces deux matières.

La RDC ne devra pasdisparaître au profit de la survie de la sous-région des Grands Lacs. C’estdésormais de notoriété, depuis la publication du dernier rapport des Nationsunies sur la situation sécuritaire en RDC, qu’une des parties signatairesdu pacte de Non agression n’a pas respecté son engagement.

Le Potentiel

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