[Le Phare]
09/09/2013
Honorables Présidents de l’Assemblée Nationale et du Sénat, Membres du
Présidium des Concertations nationales,
Mesdames et Messieurs les Délégués aux Concertations nationales,
Distingués Invités,
Chers Compatriotes,
Il est, dans l’histoire des Etats et des peuples, des moments
singuliers qui, par-delà tous les clivages, testent la solidité du
vouloir-vivre collectif, interpellent les consciences, et exigent la
mobilisation des énergies et des intelligences.
Des moments qui rappellent à chaque membre de la communauté
nationale, qu’en contrepartie des droits qu’elle lui reconnaît, la
Constitution du pays, pacte républicain par excellence, lui impose
aussi des obligations auxquelles il ne peut moralement se soustraire,
particulièrement, la défense, même au prix du sacrifice suprême, de
l’intégrité territoriale et de l’indépendance nationale.
Il en fut ainsi de la lutte pour l’indépendance de notre pays.
Il en est également de la menace qui, depuis plusieurs années, pèse
sur l’existence même de notre pays, comme Nation, voulue une et
indivisible, et comme Etat souverain dans des frontières intangibles,
héritées de la colonisation.
Sauf à trahir la mémoire des martyrs de notre indépendance et de tous
ceux qui, de génération en génération, ont donné de leur vie pour
maintenir à jamais allumée la flamme de la liberté, nous devons tous
nous sentir interpellés par cette menace et nous mobiliser, comme un
seul homme, pour y faire face.
Aucune frustration, aussi justifiée soit-elle, aucun déni de droit,
aussi condamnable qu’il puisse être, ne peuvent, en cette
circonstance, expliquer l’inaction, l’apathie ou l’indifférence ;
moins encore la sympathie pour ceux qui portent atteinte à notre
souveraineté, ou la participation, consciente ou forcée à leurs
projets funestes et aux souffrances qui en découlent pour nos
populations.
Cest tout le sens de la démarche que j’ai initiée en convoquant les
Concertations nationales.
Une démarche plutôt citoyenne que politicienne !
C’est aussi le sens de la réponse sans équivoque que vous avez daigné
y réserver, comme en témoigne votre présence, nombreuse et variée, à
ces Concertations, leur conférant ainsi un caractère national,
inclusif et représentatif.
Une réponse responsable et patriotique !
Une réponse qui fait de vous des dignes héritiers des Pères de
l’indépendance et de tous ceux qui, à un moment ou à un autre de notre
histoire, ont porté haut le flambeau de la lutte pour la liberté,
l’unité et la grandeur de notre pays.
Je tiens donc à en féliciter chacun de vous.
Je tiens aussi à rendre un vibrant hommage au Président Denis SASSOU
NGUESSO de la République sœur du Congo, pour sa sollicitude à l’égard
de ce processus et pour son engagement en faveur de la paix et de la
stabilité dans notre Région.
Je me réjouis tout autant du soutien, sans condition, que l’ensemble
des partenaires extérieurs de notre pays nous ont apporté dès le début
de la guerre et à l’annonce des Concertations nationales.
Je pense ici, de manière particulière, à la SADC, à la CIRGL et à
l’Union Africaine qui jouent un rôle essentiel dans le maintien de la
paix régionale.
Je pense aussi à Monsieur BAN-KI-MOON, Secrétaire Général des Nations
Unies, à Madame Mary ROBINSON, son Envoyée Spéciale pour la Région
des Grands Lacs, et à Monsieur Martin KOBLER, son Représentant Spécial
en République Démocratique du Congo, et à travers eux, aux membres du
Conseil de Sécurité et aux instances de l’Union Européenne pour leur
contribution dans la recherche d’une paix durable dans notre Région.
Honorables Membres du Présidium,
Mesdames et Messieurs les Délégués,
Chers Compatriotes,
Compte tenu de la dégradation de la situation sécuritaire et
humanitaire dans la Province du Nord-Kivu, les Chefs d’Etat et de
Gouvernement de la CIRGL viennent de se réunir à Kampala.
A cette occasion, une injonction a été donnée aux forces négatives
d’arrêter toutes leurs activités militaires et de guerre ainsi que
leurs menaces de déstabilisation de la République Démocratique du
Congo.
Aucun effort ne sera ménagé pour que les réunions de Kampala
aboutissent à la restauration de la paix et de l’autorité de l’Etat
sur toute l’étendue du territoire national, faute de quoi nos Forces
Armées assumeront ce devoir.
A maintes reprises, j’ai indiqué que trois options fondamentales, à
savoir politique, diplomatique et militaire, sont déterminantes pour
mettre fin à cette guerre qui nous est injustement imposée.
Il n’y a donc pas de contradiction entre la reprise du processus de
Kampala et la tenue des Concertations nationales.
Ces Concertations Nationales se tiennent alors que notre pays est,
une fois encore, agressé par ceux qui cherchent, par tous les moyens,
à le déstabiliser.
La guerre qui, aujourd’hui, a pour théâtre principal les territoires
de Rutshuru et de Nyragongo, vise, en fait, à créer les conditions
objectives pour le démembrement du grand Congo.
Prendre conscience de la nature véritable et des enjeux de cette
guerre est une condition de la victoire. Se mobiliser, s’organiser et
agir en sont une autre.
C’est aussi la mesure de notre patriotisme.
Comment, dans ces conditions, ne pas rendre un hommage mérité aux
éléments de nos Forces Armées et de sécurité, qui font preuve d’un
courage et d’un sens de sacrifice extraordinaires sur le terrain des
combats.
Comment non plus ne pas saluer les contingents militaires de la
Tanzanie et de l’Afrique du Sud, qui y ont été récemment déployés dans
le cadre de la Brigade d’intervention de la MONUSCO et, par-delà,
leurs peuples et Gouvernements respectifs, pour leur engagement
déterminé et appréciable aux côtés de nos troupes.
Je voudrais également réitérer mes remerciements à tous les Etats
qui, depuis plusieurs années déjà, ont disponibilisé leurs troupes
pour le maintien de la paix en République Démocratique du Congo.
En votre nom à tous, je tiens à exprimer aux uns et aux autres, la
gratitude profonde de la Nation congolaise.
Je tiens tout aussi à exprimer notre compassion et notre solidarité
aux populations fortement meurtries et lourdement éprouvées du
Nord-Kivu, du Sud-Kivu et de l’Ituri.
Je leur renouvelle mon engagement et celui de toute la Nation, de
tout entreprendre, quoi qu’il en coûte pour les sécuriser, et de
mettre définitivement fin à leurs souffrances.
En souvenir de tous nos soldats ainsi que de ceux de la MONUSCO
tombés sur le champ d’honneur, et des victimes innocentes de la haine
aveugle des ennemis de notre peuple, je vous invite à garder quelques
instants de silence.
Honorables Membres du Présidium,
Mesdames et Messieurs les Délégués,
Chers Compatriotes,
C’est conscient de la gravité de la situation sécuritaire dans la
Province du Nord-Kivu, et de la menace existentielle qui en découle
pour l’ensemble de la Nation, mais aussi fort de mes prérogatives de
Chef de l’Etat, Garant du bon fonctionnement des Institutions, que
jai décidé d’organiser les présentes Concertations.
Elles se veulent un cadre de travail apaisé, transparent et sans
objectif caché ; un cadre de réflexion objective, hors de toute
agitation et de tout affairisme politique ; une manifestation
éloquente de notre capacité à discuter et à décider, en toute liberté,
sans ingérence extérieure, et dans le respect de la Constitution, des
lois et des Institutions de la République.
En effet, c’est depuis novembre 2012 que jai reçu, tour à tour, les
Groupes parlementaires de la majorité et de l’opposition au sein du
Parlement, les partis politiques, aussi bien de la Majorité que de
l’Opposition, ainsi que la Société civile dans sa diversité. J’ai, par
la suite, constitué le groupe consultatif national et promis de mettre
en place un cadre d’échanges approprié pour promouvoir la cohésion
nationale.
L’objectif poursuivi par les présentes assises est de dégager les
voies et moyens susceptibles de rétablir et de consolider la cohésion
interne, en vue d’assurer la victoire sur toutes les forces
d’agression, de renforcer l’autorité de l’Etat sur l’ensemble du
territoire national, de mettre fin au cycle infernal des violences à
répétition, principalement dans le Nord et le Sud-Kivu ainsi que dans
l’Ituri, de conjurer toute velléité de s’associer aux tentatives
exogènes de déstabilisation du pays et de planifier, ensemble, son
développement socio-économique dans la paix et la concorde.
Je souhaite de tout cœur que ces Concertations nationales soient,
d’abord et avant tout, perçues et vécues comme une rencontre
citoyenne, entre fils et filles d’un même pays, partageant un destin
commun, et déterminés à en tirer le meilleur profit collectif, non
seulement pour eux-mêmes, mais également pour les générations futures.
Cela étant, vous devriez, au cours de ces Concertations, avoir le
loisir d’aborder tout sujet d’intérêt général. Néanmoins, au regard
des priorités du moment, et pour des raisons d’efficacité, cinq
thématiques, correspondant à autant d’Etats généraux, ont été retenues
:
1. Gouvernance, démocratie et réformes institutionnelles ;
2. Economie, secteurs productifs et finances publiques ;
3. Désarmement, démobilisation, réintégration sociale et/ou
rapatriement des groupes armés ;
4. Conflits communautaires, paix et réconciliation nationale ;
5. Décentralisation et renforcement de l’autorité de l’Etat.
Sur chacun de ces sujets, suffisamment ouverts pour permettre de tout
aborder, il s’agira de réfléchir, d’échanger et de débattre, en toute
liberté et sans contrainte.
En conséquence, il est reconnu aux Délégués aux Concertations
nationales l’immunité de parole, sous réserve, bien entendu, du
respect des lois, de l’ordre public et des bonnes mœurs, principe
consacré par notre Constitution.
J’en appelle donc à tous ceux qui hésitent encore, à venir participer
à ce forum pour y apporter leur contribution.
Honorables Membres du Présidium,
Mesdames et Messieurs les Délégués,
Chers Compatriotes,
Les Délégués aux Concertations nationales n’ont pas vocation à se
substituer au Souverain primaire ; moins encore, à remettre en cause
les décisions qui relèvent du pouvoir exclusif de ce dernier.
Leur marge de manœuvre demeure cependant importante.
Car, ils ont la possibilité, j’espère qu’ils en feront bon usage,
d’aider, par une réflexion sereine et responsable, à concevoir les
réformes nécessaires pour mieux assurer l’intégrité du territoire et
la souveraineté de l’Etat, garantir la sécurité des personnes et des
biens, approfondir et consolider la démocratie, améliorer la
gouvernance politique et sociale, et rendre la croissance économique
plus forte, durable et socialement bénéfique pour nos populations.
Honorables Membres du Présidium,
Mesdames et Messieurs les Délégués,
Distingués Invités,
Chers Compatriotes,
La situation politique, économique, sociale, culturelle et sécuritaire
de notre pays a déjà fait l’objet de plusieurs réflexions, analyses,
études et rapports, souvent de haute facture.
Ce fut le cas, notamment, lors de la Conférence nationale souveraine,
des Concertations du Palais du Peuple et du Dialogue Inter-congolais.
C’est à cet exercice que Députés et Sénateurs consacrent l’essentiel
de leurs délibérations.
Des présentes assises, le peuple attend plutôt un consensus sur les
pistes réalistes de solution aux problèmes majeurs auxquels sont
confrontés le pays et la Nation, de manière à permettre la cohésion
nationale et la consolidation de la paix, gages d’un développement
harmonieux et durable.
C’est là la meilleure façon de préparer et de bâtir l’avenir de notre pays.
J’ai foi en vos capacités pour ce faire ; de la même manière que j’ai
toujours eu foi en notre pays et en notre peuple.
Comme le disent les saintes écritures, je cite : « le Très haut ne
tente jamais personne au-delà de ses capacités », fin de citation. En
effet, je sais que nous sommes dignes de notre destin.
Ce moment historique est à saisir aujourd’hui.
Et c’est à vous, Délégués aux Concertations nationales, ici réunis,
qu’il revient de démontrer, par le sérieux et la qualité de vos
travaux, que la République Démocratique du Congo est non seulement
résolue, mais prête à assumer le rôle auquel le Maître des temps et
des circonstances la destine.
A cette fin, j’en appelle à la mobilisation des efforts et des
énergies pour que notre pays redevienne un havre de paix,
définitivement libéré des forces négatives, autant que du spectre de
la guerre et des violations massives des droits humains.
A la faveur de la tenue des présentes assises, et pour permettre une
décrispation de la situation, des mises en liberté conditionnelle de
certains prisonniers vont être effectuées.
Je vous annonce, par ailleurs, qu’une grâce présidentielle est à
l’étude en attendant le vote par le Parlement d’une loi d’amnistie.
Tout en vous souhaitant des échanges fructueux, dans l’intérêt de la
Nation, et dans un esprit de tolérance et de respect mutuel, je
déclare ouvertes les Concertations nationales.
Que Dieu bénisse la République Démocratique du Congo !
Je vous remercie.